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Les rafles, d'un siècle à l'autre

Les rafles, d'un siècle à l'autre

1 / Le propos

Si la rafle du Vél d'Hiv à Paris résonne dans la mémoire collective (13 000 personnes), celles de Marseille (25 000 en une nuit) cherchent encore leur juste écho. Celles-ci permettent pourtant de comprendre l'intersection de trois axes essentiels pour appréhender notre actualité : l'histoire de l'immigration et la stigmatisation liée aux origines ethniques et sociales ; les transformations urbaines des grandes métropoles européennes ; et l'entrecroisement des histoires locales et de l'histoire mondiale.

Hiver 1943 : les Allemands et la police française raflent les quartiers de l'Opéra et du Vieux Port, vident le quartier de St Jean de ses habitants, avant de dynamiter le berceau historique de la ville... Comment Marseille, durant la deuxième guerre mondiale, put-elle ainsi devenir le lieu tragique où coïncida un acte de guerre et un projet d'administration municipale ?

Ce travail dramaturgique permet de réconcilier des mémoires antagonistes pour que l'avenir s'épanouisse dans la richesse de sa diversité. La lutte contre l'antisémitisme est une aventure collective, pour les juifs, les chrétiens, les musulmans comme pour les athées. Une vision du monde, un choix. Il ne s’agit pas d’opposer les discriminations des uns à celles des autres, mais bien de lutter contre toutes formes de discrimination.

 

2 / La pièce

Une comédienne interprète une enfant de 1943 qui subit la violence de cette histoire, mais elle interprète également celle-ci, à nouveau expulsée de son logement, à la fin de sa vie... C'est cette ligne directrice qui nous permet de découvrir une vingtaine de personnages  : les habitants des quartiers populaires, les représentants de la municipalité, les architectes urbanistes locaux et parisiens, les hauts dignitaires nazis.

La comédienne est prise dans un dispositif de son et de lumière qui l'enserre, l'expulse et la libère. Mais elle est également elle-même le dispositif dramaturgique de certaines scènes, jouant les mouvements de foule, l’affrètement de bus et de tramways pour aller à la gare d'Arenc, puis au camp de Fréjus, ou bien au camp d'extermination en Pologne. Elle joue également, avec la délicatesse et l'humour qui lui sont propres, les personnages d'aujourd'hui, de Marseille et d'ailleurs, ainsi que les urbanistes d’Euromediterranée - établissement public d'aménagement, dont la rectitude des plans n'est pas sans rappeler d'autres plus anciens.

Gaston Castel* : « C’est l’occasion providentielle d’assainir la ville et les mœurs, de jeter bas cette vieille citadelle de la punaise et de l’infamie. Faisons du vide, enlevons ces gravats et qu’enfin cesse la honte de Marseille. Un seul moyen, raser tout et vite, et sur les ruines de ces vieilles masures, bâtir une ville nouvelle. »

*architecte en chef de 1926 à 1941
chargé d’établir le « plan directeur de la région Marseillaise ».


3 / La mise en scène

Ce spectacle allie les recherches esthétiques, à la fois expérimentales et traditionnelles, sur la potentialité de l'acteur, accompagné d'un son spatialisé et d'une scénographie épurée, audacieuse, constituée du personnage de la fumée et de la création lumière.

La comédienne joue avec le public, bien sûr, mais elle développe aussi son jeu en interaction avec la création sonore et musicale qui lui répond comme un véritable partenaire sur scène. La lumière est également « à l’écoute » de la comédienne, mais elle développe davantage son langage avec l’espace qu’elle transforme de scène en scène par un système de dévoilement et de faisceaux.

Marseille est un personnage matérialisé par une voix familière et subliminale. Elle est la mémoire, l'histoire et l'actualité de la ville et de ses habitants.

Virginie Aimone interprète près de 20 personnages sans jamais perdre la ligne directrice de la pièce qui sous-tend et lie chaque scène entre elles. De l’invisible, elle fait surgir des personnages, des situations, des objets qui métamorphosent et remplissent l’espace de jeu. Adresse directe au public, travestissements burlesques, emprunts à la commedia dell’arte, improvisation (variations textuelle, corporelle, rythmique en fonction de sa propre énergie et du public).
Elle est à la fois maître du jeu, et prise dans un dispositif de son et de lumière qui l'enserre, l'expulse et la libère.

 

Texte : Jérémy Beschon avec la collaboration de Virginie Aimone et de Pascal Luongo, avocat au barreau de Marseille et du collectif St Jean 24 janvier 1943
Mise en scène : Jérémy Beschon
Comédienne : Virginie Aimone
Création lumière : Cyrille Laurent
Musique : Franck Vrahidès et Tom Spectrum
Design sonore et régie son  : Tom Spectrum
Documentation : Vanessa Pedrotti
Ateliers de médiation : V.Pedrotti et Pauline Bernard

 


4  / La presse en parle

« Virginie Aimone est capable d’endosser une multitude d’identités. Sa capacité et sa flexibilité pour soudainement switcher sont sidérantes : ses transitions sont limpides, elle incarne superbement les tragicomédies de plusieurs personnage » – La Marseillaise
 
« Manifeste Rien apporte un éclairage glaçant sur les mécanismes qui régissent l’aménagement des territoires. » - Zébuline
 
« Les Rafles d’un siècle à l’autre et les voix anonymes qu’il convoque en devenait très émouvant sans pour autant perdre sa force de dénonciation. C’est du théâtre d’éducation populaire, souple, rapide, affuté comme l'époustouflante comédienne qui « tient » véritablement la salle…  - Ventilo

Dossier de presse complet disponible...


5 / Sources bibliographiques

Si un important travail d'histoire et de mémoire a été réalisé sur les rafles de 1943 à Marseille par des historiens, essayistes et écrivains, notre pièce s'enrichit de sources inédites. D'une part avec la thèse d'anthropologie urbaine de Marie Beschon, « Euroméditerranée ou la ville de papier, ethnographie du monde des aménageurs » ; d'autre part avec l'aide et la collaboration de Pascal Luongo, avocat au barreau de Marseille et du collectif St Jean 24 Janvier 1943. Ce dernier a plaidé pour crime contre l'humanité auprès du tribunal de grande instance de Paris en 2019. Une plainte reçue qui est toujours en cours d'enquête...


6 / Back ground et thématiques

Histoire de l'immigration et stigmatisation : La persécution nazie visait d'abord les juifs, comme en témoigne la rafle du 22 janvier dans le quartier de l'Opéra, mais celles des samedi 23 et dimanche 24 janvier ont expulsé et envoyé au camp de Fréjus 25 000  Marseillais jugés indésirables quelle que soit leur confession. La stigmatisation des habitants des quartiers du Vieux Port, nommés « la Petite Naples », prend sa source dans un violent racisme envers les classes populaires en général et envers les immigrés italiens en particulier.

L'urbanisme : Les Allemands qui ont dynamité toute la rive Nord du Vieux Port, ont trouvé des collaborateurs dévoués. Des projets tout prêts. Le plan de traçage du dynamitage reprenant celui de l'architecte français Eugène Beaudoin exécuté deux années auparavant... Un plan lui-même inspiré du plan Greber, réalisé dans les années 1930 lors de la destruction de la Blanquerie (quartier le plus peuplé de Marseille) par la municipalité, sans même savoir ce que l'on ferait à la place...

Histoire locale et mondiale : Si le berceau historique de la ville (14 hectares) a été rasé en moins d'un mois, si les habitants et le patrimoine ont été explosés, exterminés, déportés,  il en va bien sûr de la rencontre et de l'affrontement d'une cité et de ses habitants, d'une ville et d'un État, d'un quartier et d'un conflit mondial qui vit l'avènement du 3ème Reich.


7 / Les ateliers

Les ateliers de médiations peuvent accompagner la pièce en amont et/ou en aval de la représentation. Ils sont participatifs et entièrement imagés pour engager réactions et discussions. Ils présentent et développent les thématiques abordées sur scène en recourant à des matériaux hétérogènes (extraits de journaux télévisés, documents d'archives, témoignages, visuels, extraits vidéos…), ainsi qu’à des outils d’éducation populaire (débat mouvant, petite/grande histoire, photolangage, porteur de paroles).

 

 

Avec le soutien de la ville de Marseille, de la DILCRAH
du Théâtre Toursky, du Théâtre de l'Oeuvre, et du Théâtre des Chartreux

 

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